COP : CAP ou FLOP ?

COP 15 biodiversité, Kunming-Montréal, 2022.

La COP15 biodiversité s’est achevée sur un accord historique incluant 23 objectifs pour tenter d’enrayer la destruction de la biodiversité d’ici à 2030. S’il n’est pas contraignant, il fixe toutefois une feuille de route et un cadre de suivi.

La COP 15 biodiversité s’est déroulée du 7 au 19 décembre 2022 à Montréal (Canada) ; initialement prévue à Kunming (Chine) en 2020, reportée à plusieurs reprises en raison de la COVID. Cet événement était particulièrement importante. Elle avait pour enjeu d’établir un nouveau cadre mondial pour la décennie à venir, succédant aux « accords d’Aichi » adoptés en 2010 pour lesquelles aucun objectif fixé n’a été respecté.

 

 

Si l’Humanité a perdu 2 années en raison de reports de cette Conférence, la biodiversité était bien au rendez-vous en 2020 (COVID) et ne cesse d’exprimer son mécontentement, tout comme Antonio Guterres, Secrétaire Général de l’ONU, en ouverture de l’événement :

« Avec notre appétit sans limite pour une croissance économique incontrôlée et inégale, l’humanité est devenue une arme d’extinction massive. […] Il est temps de conclure un traité de paix avec la nature, […] d’assumer la responsabilité des dommages que nous avons causés […]  Cette conférence est notre chance de mettre fin à cette orgie de destruction. Je vous en conjure : faites ce qu’il faut. Agissez pour la nature. Agissez pour la biodiversité. Agissez pour l’humanité. »

En résumé

Les parties signataires (195 pays et l’Union européenne) sont parvenues à un accord à l’issue de la COP15 structuré autour de 4 grands objectifs et 23 cibles.

Les enjeux clés sont :

  • protection d’au moins 30% des terres, mers, côtes et eaux intérieures (cible 3)
  • restauration d’au moins 30% des zones dégradées (cible 2)
  • réduction des pollutions liées aux engrais, pesticides et substances chimiques dangereuses,
  • réduction de l’empreinte écologique de la consommation mondiale en réduisant de moitié le gaspillage alimentaire

 

Les facteurs clés de succès :

  • Finances : Augmentation des aides allouées par les pays développés aux pays en voie de développement
  • Méthodologie : adoption d’un mécanisme de planification et de suivi commun, avec des indicateurs précis ; avec une éventuelle révision des stratégies nationales, si les pays ne sont pas sur la bonne trajectoire.
  • Une meilleure considération des peuples autochtones.

 

Conclusion :

L’accord trouvé à Montréal a beaucoup été présenté comme l’équivalent de l’accord de Paris pour le climat. La déclinaison dans les politiques nationales des Etats sera essentielle tout comme le dynamisme des acteurs privés, la mobilisation des sociétés civiles et l’intelligence de la communauté scientifique.

Plus que jamais, biodiversanté invite à remplacer le mot « innovation » (économique, technique) par le mot progrès (éthique).

Détails des enjeux

Les 4 grand objectifs

  • Mettre un terme à l’extinction des espèces menacées par l’homme et diviser par dix le taux d’extinction de toutes les espèces d’ici à 2050.
  • Utiliser et gérer la biodiversité de manière durable.
  • Partager équitablement les avantages découlant de l’utilisation des ressources génétiques.
  • Veiller à ce que des moyens techniques et financiers pour la mise en œuvre du cadre mondial de la biodiversité soient accessibles à toutes les parties, en particulier aux pays les moins avancés et aux petits États insulaires en développement.

Les 23 cibles :

Cible 1 Diminuer à « près de zéro » la perte des aires très riches en biodiversité d’ici 2030.

Cible 2 S’assurer qu’au moins 30 % des milieux naturels dégradés seront en restauration d’ici 2030.

Cible 3 S’assurer que 30 % des milieux terrestres, d’eau douce, côtiers et marins, particulièrement ceux de haute importance pour la biodiversité, seront protégés d’ici 2030.

Cible 4 Agir pour arrêter l’extinction d’espèces causée par l’humanité et pour favoriser le rétablissement des espèces menacées.

Cible 5 S’assurer que la récolte d’espèces sauvages est faite de manière « durable, sécuritaire et légale », prévenir la surexploitation et réduire les risques de « débordement » des pathogènes d’une espèce à l’autre.

Cible 6 Réduire les conséquences des espèces exotiques envahissantes ; diminuer de 50 % les taux d’introduction de ces espèces d’ici 2030.

Cible 7 Réduire les risques créés par la pollution d’ici 2030 à des niveaux qui ne soient pas dangereux pour la biodiversité. Il est notamment question de réduire de 50 % les pertes de nutriments (comme les engrais) dans l’environnement, de réduire de 50 % les risques associés aux pesticides et de « travailler » vers l’élimination de la pollution par le plastique.

Cible 8 Réduire les conséquences des changements climatiques et de l’acidification des océans sur la biodiversité, notamment avec des « solutions fondées sur la nature » et/ou des « approches basées sur les écosystèmes ».

Cible 9 S’assurer d’une gestion soutenable des espèces sauvages, de manière à fournir des bénéfices « sociaux, économiques et environnementaux » aux communautés qui en dépendent.

Cible 10 S’assurer d’une gestion durable des territoires où l’on pratique l’agriculture, l’aquaculture, les pêcheries et la foresterie.

Cible 11 Restaurer et rehausser les services écosystémiques, comme la santé des sols et la pollinisation, avec des « solutions fondées sur la nature » et/ou des « approches basées sur les écosystèmes ».

Cible 12 Accroître significativement les espaces « bleus » et « verts » dans les milieux urbains.

Cible 13 Agir pour s’assurer du partage « juste et équitable » des bénéfices découlant de l’utilisation des données génétiques. D’ici 2030, arriver à un « accroissement significatif » du partage de ces bénéfices.

Cible 14 Intégrer pleinement la question de la biodiversité dans l’ensemble des politiques publiques, notamment celles liées au développement.

Cible 15 Agir pour que les grandes entreprises rendent des comptes au sujet de leurs effets sur la biodiversité et réduisent leurs conséquences négatives sur la nature.

Cible 16 Encourager les gens à faire des choix de consommation durable. D’ici 2030, réduire l’empreinte mondiale de la consommation, réduire de 50 % les déchets alimentaires, réduire « significativement » la surconsommation, de même que la création de déchets.

Cible 17 Mettre en oeuvre les mesures de biosécurité et de manipulation de la biotechnologie stipulées dans certains articles de la Convention sur la diversité biologique.

Cible 18 Recenser les subventions néfastes pour la biodiversité d’ici 2025. Les réduire d’au moins 500 milliards de dollars américains d’ici 2030.

Cible 19 Investir au moins 200 milliards de dollars par année d’ici 2030 pour protéger la biodiversité dans le monde. Les pays développés s’engagent à verser 20 milliards par année d’ici 2025, et 30 milliards d’ici 2030, aux pays en développement pour protéger leur biodiversité. L’accord prévoit aussi d’accroître le recours aux fonds privés. Il encourage également le fait de mettre en place des « mécanismes innovants », comme les paiements pour les services écosystémiques et les crédits compensatoires pour la biodiversité.

Cible 20 Favoriser la coopération scientifique entre les pays du Nord et ceux du Sud au sujet de l’exploitation durable de la nature et de sa protection.

Cible 21 S’assurer que les meilleures informations sont disponibles pour la prise de décisions en lien avec la biodiversité. S’assurer que les connaissances autochtones sont utilisées avec le plein consentement de leurs détenteurs.

Cible 22 S’assurer que la prise de décisions au sujet de la biodiversité se fait de manière inclusive, dans le respect des femmes, des jeunes, des Autochtones et des personnes handicapées.

Cible 23 S’assurer que la mise en oeuvre du cadre de l’accord de Kunming-Montréal est réalisée dans une perspective d’égalité des genres.

articles